Tribune
LA MARINE MARCHANDE
OUTIL CONTESTE DE NOTRE VIE CONTESTABLE
© ShipMap.org
Vendredi 6 décembre. En mer, Méditerranée centrale, MS Rotterdam Voici donc ce qu’est une journée standard pour un passager de paquebot. Nous faisions aujourd’hui notre quatrième escale, et les habitudes commencent à s’établir. Après un rapide petit-déjeuner au Lido, nous fûmes en ville dès 10 heures. Héraklion conclue la première partie de notre croisière : la journée de demain se déroulera en mer, et nous serons ensuite à Malte puis en Italie. La visite d’Héraklion me laisse tiède, m’enthousiasmant beaucoup moins que celle de Marmaris. La capitale de la Crête est résolument vouée à son rôle touristique, et s’offre sans retenue aux vacanciers qui transitent vers les plages et le mythique palais du Minotaure. Même à bord, très peu nombreux sont les passagers qui exploreront la ville elle-même. Le tour de la ville, sur les remparts, demeure une promenade verdoyante et très agréable : le front de mer se partage entre petites marinas et vestiges historiques, les hautes fortifications qui ferment la ville au sud offrent un panorama sur l’arrière de celle-ci. Témoins de la violence qui a pu régner autour des points stratégiques en Méditerranée au cours de l’Histoire, ils sont désormais un lieu populaire de balade. Par endroit, il est même possible d’apercevoir le port de commerce et notre navire à quai. D’ailleurs, nous ne sommes pas tout à fait seuls aujourd’hui : le fantomatique Golden Prince est désarmé à quelques mètres du Rotterdam. Ce navire construit en 1973 a d’abord été utilisé comme car-ferry au Japon, avant de naviguer comme paquebot en Grèce puis d’être reconverti dans les années 90. Il proposait encore en 2011 des croisières à la journée au départ de la Crête ; mais il n’a pas quitté son amarrage depuis maintenant deux ans, et son aspect extérieur suffit à réduire à néant tout futur optimiste. Nous reprîmes place à bord de notre paquebot aux alentours de 16.20. J’attendrai l’appareillage sur la plage avant, alors que le jour baisse doucement : le ciel dépourvu de nuages se colore d’orangé tandis que l’île se transforme en masse sombre ponctuée de lampadaires. Afin de me protéger du vent, je remontai au pont 6 pour l’appareillage lui-même : une fois les digues passées, nous filons plein ouest, longeant ainsi l’île grecque. Alors que la silhouette de la Grèce s’éloignait pour une dernière fois, nous faisons un tour rapide au Lido pour saluer des connaissances de voyage. Il sera ensuite vite temps de retrouver les belles tenues : ce soir, c’est à nouveau dîner formel. Nous atteignons le restaurant vers 18.15 et rejoignons une très agréable table de sept convives. Le repas sera une très belle expérience, qui nous permis d’oublier celle d’hier. De plus, comme prévu, nous avons pu passer une heure à profiter du piano au MIX avant de rejoindre le théâtre pour le spectacle. Ce dernier était ce soir d’un registre différent : pas de concert ou de music-hall, mais un époustouflant spectacle de gymnastique. Les deux protagonistes, artistes autant qu’athlètes, nous offriront une heure d’élégantes prouesses. L’ambiance du théâtre n’a jamais été si retenue, les passagers étant suspendus aux deux corps semblant voler. La fin du spectacle sera marquée par un soupir de soulagement, suivi d’un tonnerre d’applaudissements.
La journée se termine à nouveau au Crown Nest. Demain se passera à bord ; ce sera sans doute l’occasion de retrouver le plaisir du jacuzzi. Je dois aussi interviewer le directeur de croisières en début d’après-midi ; pour un échange qui s’annonce très riche. Mais en attendant, la piste de danse m’appelle ; après tout, pour une fois qu’il y a une passagère de mon âge… Posons donc les stylos.
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La rubrique de MathieuDeux fois pas mois environ, retrouvez ici un reportage signé Mathieu Burnel, ex-auteur de Ships in Cherbourg. |