Tribune
LA MARINE MARCHANDE
OUTIL CONTESTE DE NOTRE VIE CONTESTABLE
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Mardi 3 décembre. En mer, Mer Égée Quelle journée ; quelle stupide et absurde journée. La visite d’Aliaga était parmi les priorités de ce voyage ; son annulation aurait au moins pu, j’espérais, se faire sur un motif valable… Le destin est une drôle de chose, surtout en mer. Pourtant, la météo nous a été très favorable. Jusqu’au dernier moment, notre escale était menacée par le vent, un peu excessif pour un débarquement en chaloupe ; mais à neuf heures, nous avions jeté l’ancre dans la baie de Dikili. Deux annexes furent mises à l’eau ; la première partit pour transférer un passager malade pendant que la seconde se préparait pour recevoir les excursionnistes. Le vent est alors assez faible dans la baie, et la mer à peine ondulée. Mais au retour de l’annexe, c’est une nouvelle aussi inattendue qu’incompréhensible qui arrive : en raison de travaux sur le quai, nous ne pourrons pas débarquer. Toutes les alternatives possibles et imaginables sont proposées par le bord, en vain, notamment un transit par le port de plaisance - ce qui se fait dans de très nombreux ports. Ni l’autorité locale ni l’agent de la compagnie n’avait jugé utile de prévenir Holland America de la déconvenue… Dikili fait vraisemblablement partie des ports pour lesquels la croisière est plus un fardeau qu’une priorité. A 10.15, bredouilles, nous avons donc levé l’ancre après seulement une heure sur place. Pour le staff du navire, la journée s’annonce alors très chargée. Il s’agit tout d’abord d’occuper les passagers pendant la dizaine d’heures passées en mer : aux visites à terre se substitueront diverses activités, notamment des concerts et des démonstrations de cuisine. Le bord doit également rembourser tous les passagers qui avaient réservé des excursions à terre, sans compter les taxes portuaires… Quoi qu’il en soit, fort est à parier que Dikili ne reverra pas de navire Holland America avant un certain temps. La route suivie ce jour mérite d’être remarquée : le Rotterdam n’a pas effectué le moindre détour sur l’itinéraire prévu initialement, en dépit du temps supplémentaire en mer. Nous suivons rigoureusement la route tracée et prévue pour une nuit de navigation, mais à très faible vitesse (à peine 5-6 nœuds). La tendance est aujourd’hui à l’économie et l’écologie : il ne s’agit plus de gaspiller un carburant toujours plus cher. Mick et moi passons quelques instants au Crown Nest, scrutant la côte en espérant apercevoir les plages d’Aliaga ; malheureusement une légère brume réduit nos projets à néant. Après un déjeuner consistant au Lido, nous avons passé l’essentiel de notre après-midi à la piscine. J’aurai profité des jacuzzis pendant un peu plus de deux heures… Cela est au cœur des plaisirs d’une croisière. Contrairement à mes craintes, les passagers sont assez peu nombreux ici : beaucoup flânent dans les salons ou sur la promenade extérieure. Après la piscine, j’irai combler une grande faim naissante grâce à une nouvelle farandole de desserts, toujours au Lido : malgré ses horaires, un peu serrés à mon goût, le Lido offre tout l’après-midi une sélection sucrée ; le bar à glaces demeure quant à lui ouvert de 11h à 20h. Un peu court pour les grands amateurs comme moi, mais en parfaite adéquation avec le public de la compagnie. La soirée suivra son cours désormais routinier : nous rejoignons le restaurant vers 19.30, puis le théâtre à 22 heures. Aujourd’hui, Neil Lockwood, chanteur de renom qui a notamment participé aux groupes Electric Light Orchestra et Alan Parson Project, incarne Elton John pour notre plus grand plaisir. C’est une soirée Rock n’Roll à l’américaine, incluant une bonne dose d’humour et de scènes déjantées. Nous avons retrouvé ensuite le Crown Nest et salué David qui profitait du manque de public pour prendre un cocktail soft mais néanmoins rafraichissant. Dans quelques minutes, je réaliserai un de mes plus beaux rêves : nous éteindrons toutes les lumières du salon puis passerons le célèbre Shine on You, Crazy Diamond de Pink Floyd. Le ciel est d’un clair magnifique, et la pleine lune brille sur les eaux sombres de la Mer Égée. L’instant s’annonce parfait.
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La rubrique de MathieuDeux fois pas mois environ, retrouvez ici un reportage signé Mathieu Burnel, ex-auteur de Ships in Cherbourg. |