Tribune
LA MARINE MARCHANDE
OUTIL CONTESTE DE NOTRE VIE CONTESTABLE
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Lundi 9 décembre. Détroit de Messine, Italie, MS Rotterdam Un instant magique : là, tout de suite. Le Rotterdam glisse en silence entre la Sicile et l’Italie. Il fait nuit noire ; nous sommes une poignée de passagers à assister à cet impressionnant transit. Je distingue quelques promeneurs sur la rive ouest, dont nous nous sommes beaucoup rapprochés : nous avons l’impression de traverser une ville en parfaits spectateurs, un peu à la manière décrie par Saint Exupéry dans son Vol de Nuit. La partie avant de notre navire profite de plus de l’obscurité qui règne pour la passerelle, celle-ci accentuant la sensation de proximité avec la terre ferme. Le détroit de Messine est un des passages stratégiques de la Méditerranée : depuis l’Italie, il permet de partir vers le sud sans contourner la Sicile. Il forme un entonnoir ouvert vers le sud, se terminant avec une pointe très étroite inclinée vers le nord-est. Cette forme engendre d’ailleurs un fort courant, qui atteint aisément les 6 ou 7 nœuds : en bref donc, une navigation délicate, et immanquable pour ma part. J’ai dû sacrifier pour elle une table très agréable et un dessert prometteur… Mais le jeu en valait la chandelle. C’est encore une journée magnifique qui se termine à présent. Catane est un port d’escale souvent boudé au profit de Palerme, l’emblématique cité sicilienne ; pourtant, la ville dominée par l’Etna vaut le détour. Son centre, ancien et typique de la Méditerranée, n’a été ni écrasé ni enlaidi au nom du tourisme. Après un premier tour rapide en matinée, nous avons poussé cet après-midi jusqu’au nord de la ville. S’y situe un vaste jardin public très romantique, donc chaque banc accueille quelques amoureux, jeunes ou non. Ignorant l’hiver qui arrive à grand pas, les arbres ont gardé leurs couleurs automnales flamboyantes, qui accentuent le côté sauvage de certains recoins. Nous restons dans Catane jusqu’en milieu d’après-midi, pour rembarquer aux alentours de 16 heures : le temps notamment de visiter un amphithéâtre romain, caché entre les immeubles et se dévoilant, gigantesque, au voyageur à l’affût. La fin d’après-midi se poursuivra selon le programme routinier, avec une pause relativement longue au Lido en prévision des privations de ce soir. Une fois encore, le départ se fait à la tombée du jour, cela dit largement prolongé par le ciel épuré. La navigation que l’on a effectuée depuis est demeurée en vue de la Sicile. La soirée se terminera dans quelques heures, après le spectacle du soir - dont la première séance, débutée à 20h, fait actuellement raisonner le pont extérieur. Au programme de ce dernier, les grandes chansons d’amour des années 50 à 80 : j’apprécierai la performance à défaut du contenu lui-même. Mais juste après, j’aurai à peine le temps de filer à l’extérieur pour profiter d’un nouveau moment privilégié. Sur tribord, nous longerons le Stromboli, aujourd’hui le volcan le plus actif d’Europe. Sa dernière éruption datant de 2007, il ne sera ce soir qu’une île anonyme, cependant reconnaissable pour sa forme conique. Cela en attendant demain, et le plaisir de voir le Vésuve.
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La rubrique de MathieuDeux fois pas mois environ, retrouvez ici un reportage signé Mathieu Burnel, ex-auteur de Ships in Cherbourg. |